Bonjour à vous qui, dans le maelström du net, êtes arrivés, par hasard? lassitude? erreur? sur ce blog. Vous êtes les bienvenus. Vous y lirez des extraits d'articles, de pensées, d'interviews, piochés ça et là, et illustrés de photos et dessins détournés, via un humour de bon aloi. Vous pouvez évidemment réagir avec le même humour, la même ironie que nous mettons, chaque jour, à tenter de respirer un peu plus librement dans une société qui se corsète chaque fois un peu plus.

mercredi 22 mai 2013

"Il n'était pas mécontent d'appartenir à une Humanité sur le point de disparaître". Benoît Barvin in "Pensées pensées".

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Pensées pour nous-mêmes:

(RETIENS-TU L'EAU
AVEC TA PENSÉE?)

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LONG RÉCIT AU LONG COURS (1/15)

pcc Benoît Barvin et Blanche Baptiste

Auprès des religieuses de la communauté, la jeune Elaine Cantagril semble trouver peu à peu un certain calme, voire un semblant d'apaisement...


ANGÉLUS 
ou 
LES SECRETS DE L’IMPALPABLE



The Convent Choir. painting by Jehan Georges Vibert

CHAPITRE 6 

   Un après-midi, Elaine se promenait dans les jardins du couvent en compagnie de Soeur Jeanne. L’air était chargé des premières senteurs du printemps. De nombreux oiseaux voletaient dans le jardin en pépiant. Un soleil encore timide faisait resplendir la Nature en fête. 

   La religieuse s’occupait des massifs de plantes et de fleurs, les élaguant à l’aide d’une petite faucille et d’une paire de ciseaux, traquant chaque brin d’herbe susceptible de détruire le bel agencement de l’ensemble. Elle y mettait de l’entrain et, en dépit de la règle de la bienséance, elle avait remonté ses manches plus qu’il n’aurait fallu. 

   A chaque mouvement qu’elle effectuait pour tailler les massifs, il lui échappait un léger soupir qui trahissait son plaisir. Elaine, quant à elle, la suivait avec une corbeille dans laquelle elle ramassait les multiples débris végétaux. 

   - Ce couvent m’amène à reprendre espoir, confia-t-elle à Soeur Jeanne, alors que cette dernière s’asseyait sur un banc, le visage rouge de l’effort accompli et qu’elle l’imitait. 

   - Je suis contente, Elaine. Si tu savais comme je suis heureuse ! Notre Seigneur t’a enfin effleurée de son amour et il va te transfigurer ! s’exclama la novice avec une joie enfantine. 

   Elaine sourit légèrement. 

   - C’est grâce à l’atmosphère de ce lieu, à ton amitié et à la grande piété des Soeurs. Ce calme que je commence à ressentir vient également de la Mère Supérieure qui m’a reçue avec une grande gentillesse... 

   A ces mots, Soeur Jeanne fronça les sourcils et un nuage de préoccupation brouilla la douceur de ses traits. 

   - J’ai dit quelque chose qui t’a fâchée ? demanda Elaine. 

   La jeune religieuse baissa la tête sans répondre. En elle semblait se livrer un dur combat. La prudence et la règle interne lui commandaient de se taire. Cependant, la jeunesse que charriait son sang généreux lui ordonnait de parler. Étonnée du changement qui venait de s’opérer chez la jeune novice, Elaine insista. 

   - Je croyais pourtant que votre communauté était depuis longtemps sanctifiée. D’ailleurs, à part Soeur de la Miséricorde que je trouve trop dure à ton égard, toutes les autres Soeurs me paraissent dignes d’éloge... Je te l’affirme : votre communauté me redonne envie de vivre. 

   Pendant qu’elle parlait, la vision d’Adrien, transformé en un squelette dégoulinant d’humeurs, fut là devant elle et, en dépit de ses efforts, des lambeaux de cette horreur l’emmaillotèrent un moment. 

   Cette même nuit, Elaine avait eu un nouveau cauchemar dans lequel le jeune homme avait tendu des mains aux chairs pendantes, aux doigts effilés comme ceux des sorciers. Son visage aux orbites crevées, au nez corrompu et à la bouche aussi noire que les cavernes de l’Enfer, s’était approché d’elle, prêt semblait-il à un horrible baiser, et seul un réveil en sursaut, le cœur battant à tout rompre, avait empêché le contact qu’elle redoutait plus que tout... 

   La vision s’estompa mais le silence persista entre les deux jeunes femmes. A côté d’Elaine, Soeur Jeanne se tortillait sur le banc, visiblement mal à l’aise. Autour d’elles, d’autres soeurs s’activaient pour rendre au jardin une propreté de bon aloi et, parfois, quelques propos joyeux parvenaient jusqu’à leurs oreilles. On parlait surtout de la visite prochaine de l’évêque du diocèse et de quelques autres personnalités. 

*** 

   Dans cette vie communautaire où chaque moment de la journée était strictement réglé, les visites extérieures prenaient une importance considérable. Elaine avait également entendu dire qu’à cette occasion des subsides pouvaient être octroyés au monastère qui en avait bien besoin. Il était par exemple nécessaire de remplacer le vieil âne qui tirait avec de plus en plus de difficultés la charrette, et de se procurer un nouveau métier à tisser, l’actuel ne tenant plus que « par l’opération du Saint-Esprit », ainsi que le disaient les Soeurs, en souriant sous cape. 

   Au bout d’un long silence, la jeune novice finit par glisser, la voix rauque. 

   - Ce lieu est sanctifié par instant, Elaine... C’est vrai. Mais parfois le Diable sait mettre ses plus beaux atours dans le but de nous abuser. 

   - Que veux-tu dire ? demanda Elaine, très étonnée. 

   La jeune novice se mordit les lèvres et c’est d’une voix altérée par l’émotion qu’elle poursuivit, en regardant droit devant elle. 

   - Notre Vénérée Mère Camille de l’Incarnation a beaucoup souffert. Savais-tu qu’elle porte, à même la peau, un affreux cilice en crin dans lequel elle a enchâssé de minuscules petites pointes en fer ? Chaque jour que Dieu fait, elle mange également un immonde brouet pour, nous a-t-elle dit, que Notre Seigneur l’accueille dans sa Sainte Douceur... 

   Soeur Jeanne s’arrêta de nouveau. Elle fit un geste pour se lever mais Elaine l’en empêcha, en lui serrant la main. 

- Tu m’en dis trop ou pas assez ! fit-elle d’un ton impérieux. C’est péché que de mentir ou de dire du mal de quelqu’un qui n’est pas là ! Pourquoi l’attitude de votre Supérieure te choque-t-elle à ce point ? 

   La novice blêmit et se troubla. Elle ne fit aucun geste pour échapper à la poigne d’Elaine, se contentant de baisser la tête et de reprendre, la voix mourante, au bord des pleurs. 

   - Je n’aurais pas dû te parler de ça... Je… Je me demande ce que notre supérieure a à se reprocher pour s’imposer de telles souffrances. Oh, sois-en persuadée, Dieu m’est témoin que je ne veux pas critiquer ses lois mais... 

   - Mais les médisances sont un péché mortel, Soeur Jeanne ! la coupa une voix sèche. 

   La religieuse sursauta, ainsi qu’Elaine. Près d’elles venait de surgir Soeur de la Miséricorde. Elle fronçait ses sourcils fournis et un pli amer déformait ses lèvres minces. Elaine comprit que Soeur Jeanne de l’Enfant Jésus allait être réprimandée. 

   - Notre couvent est respecté dans tout le département, Ma Fille, continua la vieille religieuse sur un ton de plus en plus ardent. Jamais personne n’a eu à se plaindre d’une quelconque vilenie de notre part ! Les mots peuvent tuer, Soeur Jeanne, et ils sont une offense à l’enseignement de Notre Seigneur Jésus dont vous portez le nom, je vous le rappelle. Il suffit avec vos balivernes ! Venez avec moi ! Vous devez subir le juste châtiment de votre irrépressible verbiage. 

   « Quant à vous, continua-t-elle en s’adressant à Elaine sur un ton tranchant, je vous laisse poursuivre le travail de Soeur Jeanne. Nul doute que vous aurez à coeur de prouver la reconnaissance que vous nous devez 

***
(A Suivre)


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"Oh Mon Dieu! Z'ai cru voir un gros banquier!"


Nancy Carroll 

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"Comment ça, j'ai regardé ce squelette plus que les autres?
Oh, toi et ta jalousie ridicule..."


Elliott Erwitt


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"Mais oui! C'est un gros banquier...
Avec un gros chéquier! Miam!"



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"Donc, je dois rester comme ça pour tenir ce tableau...
Vous ne me prendriez pas pour une Blonde, par hasard?"


Ann Cornwall by Harold Dean Casey c.1924

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Jacques Damboise

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